La Franc-Maçonnerie est-elle une sorte de secte ?

 

 

Le 20 février 2002, neuf des plus importantes obédiences de la Maçonnerie française (soit 80% des "maçonnes" et "maçons" de France) ont signé la déclaration suivante :

 

" Héritières de près de trois siècles de franc-maçonnerie en France, assumant leurs racines communes dans les obligations inscrites par James Anderson en 1723, fières de leurs identités et de la diversité des parcours qu'elles offrent à des soeurs et des frères de toutes origines et de toutes conditions, les obédiences maçonniques françaises fondatrices de "la Maçonnerie Française", proclament la déclaration commune suivante, à l'écart des controverses partisanes, engagées dans une démarche initiatique qui émancipe les consciences...

 

  • la primauté d'un parcours équilibré entre démarche initiatique, pratique d'une méthode symbolique et engagement citoyen et social.

 

  • le rejet de tout dogmatisme et de toute ségrégation.

 

  • le refus de tous les intégrismes et de tous les extrémismes.

 

  • la volonté de travailler à l'amélioration de la condition humaine, aux progrès des libertés individuelles et collectives.

 

  • la défense et la promotion de la liberté absolue de conscience, de pensée, d'expression et de communication.

 

  • la défense et la promotion de la laïcité, liberté essentielle qui permet toutes les autres.

 

  • la recherche du dialogue pour la paix, la fraternité et le développement.

 

Elles décident de travailler ensemble à l'amélioration de l'homme et de la société et invitent les frères et soeurs de toutes les obédiences maçonniques à rejoindre cette démarche commune. "

 

 

Une secte, dans le sens qu'on donne habituellement à ce mot, présente les caractéristiques suivantes...

- Un "gourou" et des "disciples".

Il n'y a pas de "gourou" en Franc-Maçonnerie. Les Grands-Maîtres sont élus chaque année, pour un mandat d'un maximum de trois années consécutives, au terme duquel il doivent céder leur place à un autre, quelles qu'aient été leurs qualités.
Par ailleurs, il n'y a jamais eu de "chef", ni même de "direction mondiale" de toute la Franc-Maçonnerie : un Grand-Maître ne préside que sa seule obédience et il y a plusieurs obédiences dans chaque pays et toutes sont indépendantes !

 

- Un livre ou un ensemble de textes censés contenir l'Ultime Vérité.

Pour les Francs-Maçons, l'ultime vérité n'est pleinement accessible à aucun être humain.
La majorité des Loges à travers le Monde utilisent la Bible en tant que symbole, mais les Maçons sont absolument libres de l'interpréter comme il le souhaitent. Dans certaines obédiences, on n'utilise d'ailleurs plus aucun livre, justement de peur que ce symbole traditionnel ne puisse être utilisé par certains pour influencer les opinions des autres.

 

- Un enseignement supposé répondre aux grandes questions de l'existence.

Il n'y a pas aucun enseignement de ce genre en Franc-Maçonnerie. Les Maçons ont des techniques de travail et des symboles qui leur permettent d'échanger des points de vue sur les grandes questions de l'existence comme sur d'autres sujets. Ils peuvent ainsi confronter fraternellement leurs propres convictions, ou les "enseignements" qu'ils ont reçus ailleurs (dans leur religion, à l'université, ou d'une manière générale dans leur vie), mais la Maçonnerie n'est pas le lieu de la diffusion de tel ou tel enseignement particulier.

 

- Un "credo" ou un ensemble de choses que les membres sont censés croire.

Ceci n'existe pas en Franc-Maçonnerie. Visitez les sites des obédiences, vous n'y trouverez aucun "credo". Plus précisément, notre obédience n'exige aucune croyance à ses membres. Certaines obédiences travaillent "A la Gloire du Grand Architecte de l'Univers", principe créateur, tout en laissant à chacun la liberté d'interpréter ce symbole traditionnel comme il le souhaite. D'autres ont abandonné, totalement ou en partie, cette formule.

 

- Des prescriptions ou des interdits dans les domaines de la vie courante.

La seule prescription que donne la Franc-Maçonnerie à ses membres, c'est de se comporter : en personnes libres, de bonnes moeurs et plus particulièrement... de respecter les Lois !

 

- L'obéissance des disciples / l'infantilisation des membres.

Rien de tel en Franc-Maçonnerie. Quiconque a assisté à une assemblée générale d'obédience sait à quel point les Francs-Maçons ont du mal à accepter unanimement quelque consigne que ce soit.
Quant à l'idée de les voir "obéir" de manière infantile à des ordres venus de leurs dirigeants, cela ne pourra que faire sourire les dirigeants en question ! ;-}

 

- La séparation binaire du monde entre "bons/sauvés" et "méchants/damnés".

Rien de tel en Franc-Maçonnerie. C'est d'ailleurs principalement pour cette raison que la Franc-Maçonnerie a toujours été condamnée par les régimes totalitaires qui, eux, appuient leur propagande sur ce genre de séparation binaire.

 

- Le sentiment des membres d'être plus aimés, plus maternés, mieux compris dans le groupe qu'à l'extérieur.

Ceci existe dans une certaine mesure en Franc-Maçonnerie.

 

Toutefois il convient bien de relever que l'esprit de tolérance et de fraternité n'est pas extensible à l'infini.

Ceux qui recherchent une autre "famille", ceux qui ont besoin de se sentir "maternés" par le groupe, feront mieux de s'adresser ailleurs sous peine de graves désillusions.
En Franc-Maçonnerie, on les écoutera fraternellement, mais on ne les maternera certainement pas ! Disons-le tout net : Il vaut mieux avoir un peu d'expérience de la vie et être relativement solide si l'on veut entrer en Franc-Maçonnerie. Il arrive en effet qu'on y reçoive des "claques"!

 

- Un rituel particulier.

C'est sans doute le seul véritable point de vocabulaire commun entre les sectes et la Franc-Maçonnerie. Les Francs-Maçons ont un, ou plus exactement des rituels particuliers. Notons toutefois que les rituels maçonniques sont beaucoup plus anciens que l'immense majorité des rituels de sectes.
Ce point commun, qui est à l'origine d'accusations qu'on entend parfois dans les propos des anti-maçons, ne suffit pourtant pas à faire une secte.

Les cours de justice, les armées, les religions, les arts martiaux ou les mariages civils, pour ne prendre que quelques exemples, utilisent aussi des rituels particuliers. Ceci ne suffit pas à en faire des sectes.

 

- Des exigences financières exorbitantes.

Les cotisations en France s'élèvent en moyenne à un peu moins de 300 euros/an. Ce n'est pas donné, c'est vrai. Mais c'est beaucoup moins que ce que demandent la plupart des sectes (bien qu'elles prétendent souvent être gratuites... au début !). Par ailleurs des comptes détaillés sont publiés chaque année par les obédiences. C'est rarement le cas dans les sectes !

 

- L'embrigadement des enfants.

Les Francs-Maçons sont extrêmement prudents à cet égard, particulièrement en France (NOTRE laïcité spontanée nous y conduit).

Il y a dans certains pays, et même en France d'une manière très marginale, des associations d'enfants de Franc-Maçons. Elles s'adressent plutôt aux adolescents et ressemblent un peu par certains côtés aux mouvements scouts (Baden-Powel était Maçon), éclaireurs, etc.
En tous cas, il n'existe aucune école particulière, ni cours hebdomadaires pour enfants tels qu'on peut en rencontrer dans certaines religions ou sectes.

 

- Un recrutement prosélyte.

C'est exactement le contraire en Franc-Maçonnerie.

Il est relativement difficile d'y entrer (encore qu'il ne faille pas trop fantasmer sur la sélection).
Il n'est pas rare qu'un non-maçon attende plusieurs années avant que des Maçons ne viennent lui proposer une adhésion éventuelle. Il peut attendre longtemps : vu que notre règle traditionnelle prône exactement le contraire: c'est à tout postulant de faire, LUI, la première démarche !

 

- Des pressions lorsqu'on essaye de quitter la secte.

En Franc-Maçonnerie, rien de tel :

  1. La Maçonnerie n'est pas une religion. L'initiation maçonnique n'est pas un sacrement qui "sauverait l'âme" de ceux qui la reçoivent. Par conséquence, ceux qui quittent la Maçonnerie ne peuvent donc pas en "perdre leur salut" !
  2. Il est possible (et même souhaitable), si un maçon démissionne, que des membres de sa Loge lui demandent pourquoi : si quelque chose l'a déçu ? et surtout de vérifier si ce ne serait pas plutôt à cause de difficultés financières... Mais cette interrogation n'ira pas plus loin.
  3. Pour qui veut quitter la Franc-Maçonnerie, rien de plus simple : il suffit de cesser de venir aux réunions, d'envoyer une lettre de démission et de cesser de payer ses cotisations !
    (Tout à fait entre nous, cesser de venir sans se faire excuser, ou cesser de payer alors qu'on n'a pas de difficultés financières suffit aussi, mais dans ce cas on se fait radier au lieu de démissionner et ceci peut être une mauvaise méthode, qu'on risque de regretter, si un jour on souhaite revenir... et cela arrive !)

 

- La rupture vis à vis de l'environnement d'origine.

Rien de tel en Franc-Maçonnerie : un Maçon n'est nullement invité à rompre avec sa famille, ni avec sa religion d'origine s'il en a une. Au contraire, il est fréquent qu'un Maçon renoue avec une culture d'origine, ethnique ou religieuse (qu'il avait oubliée) afin de pouvoir mieux ainsi exposer leur richesse à ceux de ses Frères qui viennent d'autres horizons.

 

- La vie en communauté.

En France, un Maçon a, en moyenne, deux réunions par mois (sauf juillet, août). Pour tenter d'être un peu plus précis, il faut ajouter, dans la plupart des Loges, une ou deux réunions spéciales annuelles.
Rien en tout cas qui puisse ressembler à une vie en communauté.